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LE JEU DE LA MORT.

hydraulique, et du soir au lendemain le lac redevient prairie.

Il y a derrière le château du Ceuil un hameau d’une quarantaine de feux, avec une petite église. On l’appelle le bourg de Vesvron.

En 1828, le maitre du château du Ceuil était un vieillard octogénaire, qui avait nom Jean Créhu de la Saulays. Il était puissamment riche et passait pour ne faire ni bien ni mal à personne.

Des fenêtres de son manoir, aussi loin que ses yeux, armés de rondes lunettes d’argent, pouvaient porter leurs regards, il n’apercevait que des terres à lui appartenant. L’horizon se fermait sur ses domaines, et le hasard, qui avait fendu la montagne pour lui montrer au lointain, par une étroite échappée de vue, la vieille ville de Vitré, lui présentait justement, sur le premier plan du plus bizarre amphithéâtre de masures que l’imagination puisse rêver, son hôtel héréditaire, l’hôtel de la Saulays, grande maison gris de fer, vêtue d’ardoises depuis le faite jusqu’au premier étage, et ouvrant ses fenêtres à petits carreaux plombés sur les fossés de la ville.

Jean Créhu n’était pas aimé ; il n’était pas haï. Ses innombrables fermiers lui payaient la