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Franz n’entendait pas. Il jeta les yeux sur la seconde lettre, qui contenait seulement deux lignes d’une écriture fine et mignonne.

À peine eut-il parcouru ces deux lignes que sa physionomie changea ; sa joue se couvrit de rougeur.

— Eh bien ?… répéta Sara, j’attends votre réponse, Franz…

Et comme le jeune homme hésitait encore, elle ajouta :

— Je vous demande si vous voulez…

— J’ai entendu, j’ai entendu ! interrompit Franz précipitamment, j’accepte et je vous rends mille grâces… j’irai, oh ! j’irai !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il y avait dix minutes que madame de Laurens était partie.

Franz restait seul ; il tenait à la main la seconde lettre ouverte, et ses yeux semblaient ne point pouvoir s’en détacher.

Deux ou trois fois, depuis la sortie de Petite, il avait approché le papier de ses lèvres pour le baiser tendrement. La lettre ne parlait pourtant point d’amour ; elle ne contenait qu’une seule phrase ainsi conçue :

« D… d’A… prévient M. Franz que son départ de Paris est avancé de quelques jours ; elle se rendra en Allemagne avec la famille de Geldberg. »

— Moi aussi ! murmura Franz ; comme tout s’arrange pour moi dans cette bienheureuse semaine !… j’irai, je la verrai… Puisse la fête durer bien longtemps !

Il resta encore deux ou trois minutes pensif et perdu dans sa méditation joyeuse, puis un nuage vint à son front.

— Mais cette autre lettre ? pensa-t-il, que veut dire cet avis menaçant, et qui donc peut m’écrire ainsi ?…

Il chercha la lettre sur la table et sur le divan où il s’était assis auprès de Petite : il finit par la trouver froissée et changée en informe chiffon dans la poche de sa robe de chambre.

Il la déplia ; il la relut lentement et avec attention.

C’était étrange ! étrange ! La lettre disait tout, et la menace qu’elle contenait empruntait à la vérité des autres assertions une importance réelle.

Mais de qui venait-elle ?