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gaire, ouvrait la petite porte du laboratoire, car le battant tourna sur ses gonds rouilles à la première pression de sa main.

Quand il redescendit, il n’avait plus son panier de provisions.

La journée se passa ; le soir, à l’heure où les premières voitures, amenant les invités du dehors, arrivaient à la grille du château, madame de Laurens était seule dans sa chambre à coucher avec Joséphine Batailleur.

Il y avait déjà deux ou trois jours que celle-ci était arrivée de Paris. Depuis qu’elle avait mis le pied au château, madame de Laurens avait éloigné de sa personne Nina et son autre camériste.

Elle avait fait faire un lit à Batailleur dans une chambre attenant à son propre appartement.

La marchande du Temple avait amené avec elle une enfant qui passait pour sa fille.

C’était une jolie petite créature, à l’air souffrant et doux ; les gens du château ne l’avaient vue qu’une seule fois, au moment de l’arrivée ; depuis lors, elle n’avait point quitté la chambre de madame Batailleur.

Sara n’avait pas entièrement achevé de s’habiller pour le bal ; elle était encore à sa toilette, où Batailleur remplaçait, sans trop de désavantage, les deux caméristes absentes.

Pour donner au bal plus de caractère, la plupart des invités s’étaient concertés d’avance sur la question des costumes.

Sara, ainsi que sa sœur Esther, faisait partie d’un quadrille qui devait représenter les principaux personnages des Mille et une Nuits ; elle portait la riche veste brodée et la robe de cachemire toute parsemée de pierreries de la belle Zobéide ; un poignard recourbé pendant à sa ceinture, et il ne lui manquait que le haut turban de perles dont Batailleur fixait en ce moment l’éblouissante aigrette.

Petite attendait, assise devant sa glace. Ce costume oriental, qui semblait fait tout exprès pour son genre de beauté, lui donnait des grâces nouvelles ; elle était si charmante que Batailleur, tout en activant sa besogne, lui jetait des œillades où il y avait à la fois de l’admiration et de l’orgueil, car Batailleur se disait que cette beauté était bien un peu son ouvrage.