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tant je suis triste cavalier, autant je suis bon patineur !… une fois arrivé sur l’étang, je laissai derrière moi tous ces dandyes parisiens qui sont autant de poules mouillées… il n’y avait pour me suivre que ce brave garçon nommé Mâlou qui, bien entendu, ne faisait pas partie de la compagnie, mais qui prenait ses ébats à part.

» Morbleu ! quel coureur !… il finit par prendre l’avance sur moi et m’entraîna loin de la foule dans un lieu où la glace semblait admirable.

» Nous filions comme des locomotives, et nous étions séparés tout au plus par une dizaine de pas.

» À un certain moment, Mâlou fit un brusque détour, et me laissa passer devant.

» Mes patins grincèrent sur la glace, devenue tout à coup rugueuse ; j’étais lancé d’une telle force, que je franchis l’obstacle en un clin d’œil, mais je sentis fort bien la glace faiblir sous mes pieds.

» Elle avait dû être interrompue en cet endroit, quelques heures auparavant. »

— Et vous avez pu douter du piège qui vous était tendu ! s’écria le marchand d’habits.

— Parfaitement, répondit Franz ; d’autant plus que le pauvre Mâlou, voyant que j’avais franchi l’obstacle, ne voulut point rester en arrière et s’avança pour me rejoindre.

» Il n’avait pas d’élan ; la glace mince et toute nouvelle rompit sous le poids de son corps… Il prit là un bain froid des plus complets, je vous jure ! »

— Et vous l’aidâtes à se sauver !… interrompit Hans Dorn.

— Parbleu !…

— Eh bien ! je vous promets, moi, que ce Mâlou ne vous aurait pas rendu la pareille !

— Par exemple ! Madame de Laurens, qui avait été pour moi plus charmante que jamais depuis le commencement de cette fête, m’avait engagé à le prendre pour valet de chambre, tant elle a grande confiance en lui.

Hans secoua la tête et se tut.

— Mais vous avez votre système, reprit Franz, et vous n’en sortez