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ment, se teignaient d’émeraude, pour prendre soudain l’éclat opulent de l’or.

C’était un chaos splendide, un incendie gigantesque, une confusion inouïe d’ombres mouvantes et de radieuses clartés…

Durant la première seconde, on n’entendit que le cliquetis éclatant des artifices, répercutés par les graves échos de la montagne.

Puis un cri s’éleva dans la foule émue.

Mille voix, étouffées par une mystique frayeur, disaient ensemble :

— Les voilà ! les voilà !…

Les trois complices montraient, au premier rang de l’assemblée brillante, réunie dans l’enceinte, leurs figures livides.

Ils ne disaient pas, eux : Les voilà ! mais bien : Le voilà !

Et leurs visages bouleversés peignaient une stupéfaction inexplicable.

C’est que leurs regards ne se fixaient point au même endroit que ceux du reste de l’assemblée ; ce qu’ils regardaient, eux, c’était la place où Franz avait dû mettre le feu à la première traînée de poudre.

Cette traînée communiquait avec le mortier braqué par Mâlou et Pitois au pied des fortifications.

Mâlou avait été artilleur en sa vie ; la pièce devait être pointée comme il faut, et Franz devait disparaître, broyé par la charge du mortier, au plus beau moment du feu d’artifice.

Aussi madame de Laurens, Reinhold et Mira doutaient du témoignage de leurs yeux ; car la pièce avait fait son effet ; ils venaient d’entendre le bruit plein et retentissant de la décharge parmi les éclats aigus des pétards, et à travers les premiers flocons de fumée, ils apercevaient Franz, debout à son poste ; Franz sain et sauf, Franz qui souriait et saluait de loin l’assemblée.

Y avait-il donc une cuirasse magique autour de cette poitrine ?

Ils regardaient. Autour d’eux un mouvement se faisait dans la foule ; tout le monde se précipitait en avant ; la plate-forme était envahie.

Invités de première classe, invités surnuméraires et gens du pays se mêlaient maintenant sur la pelouse qui faisait face aux derrières du château et l’agitation gagnait, loin de s’éteindre.

De toutes parts on répétait :