» Elle se leva ; ses pieds mignons effleurèrent le tapis, en dessinant une danse vive et gaie.
» Tout en dansant, elle jeta son écharpe sur ses épaules.
» — À bientôt ! dit-elle.
» Un baiser toucha mon front ; elle était déjà sur le seuil.
» — Dans deux heures ! me cria-t-elle de loin ; devant la poste…
» Je sortis à mon tour ; je ne savais trop si je devais compter sur cette promesse étrange.
» J’arrivai devant la poste vers quatre heures, et j’entrai dans un public-house, dont les fenêtres donnent sur la rue.
» Je m’assis à une table, les yeux fixés sur la porte du bureau qui me faisait face.
» Le temps passait, les facteurs arrivaient l’un après l’autre, avec leurs cloches et leurs sacs.
» Encore quelques minutes, c’en était fait !…
» — Elle n’aura pas pu, pensai-je en préparant tristement celle de vos lettres, Otto, qui prévoyait un échec. Fou que je suis d’avoir espéré !…
» Fou que j’étais de craindre ! n’était-elle pas belle et amoureuse ! Je vis une forme svelte glisser sur le trottoir ; je m’élançai ; un papier passa de sa main dans la mienne.
» — Ne me parlez pas ! murmura-t-elle : on m’épie… À demain !
» Elle disparut dans l’ombre naissante, et je crus voir, sur le trottoir opposé, la taille haute et arrogante du Madgyar Yanos… »