Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/739

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE XII.

LE TÊTE À TÊTE.

Gertraud alla chercher sa broderie et revint prendre place auprès de la table de travail de son père.

Denise et Franz s’assirent l’un près de l’autre. Les dernières paroles de mademoiselle d’Audemer, prononcées sans nulle affectation, et qu’on aurait pu interpréter comme une marque de confiance accordée à Gertraud, donnaient néanmoins à l’entrevue un petit caractère de gravité. Ce pouvait être désormais une causerie très-intime, mais ce n’était plus un tête à tête. Denise n’avait eu qu’un mot à dire pour enlever à la situation son apparence douteuse et louche. La simplicité, ce fier et doux charme, était entre les mains de la jeune fille comme un talisman.

Sa physionomie sérieuse n’exprimait ni inquiétude ni trouble ; son regard se reposait sur Franz avec un bonheur ingénu ; et si quelque parole s’arrêtait sur sa lèvre, c’était la secrète prière adressée à Dieu qui la faisait heureuse.

Franz aurait voulu peut-être un peu plus de roman. Il éprouvait une sensation, mêlée de surprise grande et de quelque dépit à voir le mystère lui échapper sans cesse. Denise éclairait tout ; toute voie devenait droite en quelque sorte, dès qu’elle y mettait le pied. Rien qu’au son de sa parole franche et digne, l’aventure perdait son air de gaillardise. Il y