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De temps à autre, entre les coups, il se tournait tout d’une pièce et jetait un regard austère sur madame de Laurens.

En ces occasions, Reinhold souriait dans sa barbe et donnait à ses petits yeux une expression de maligne raillerie ; mais il ne disait rien, à cause du jeune M. Abel qui bâillait à côté de lui.

Au bout de trois quarts d’heure de lecture, la voix de madame de Laurens s’étouffa, soit par fatigue véritable, soit par l’effet de sa volonté. Le vieux Mosés mit sa main ridée sur les beaux cheveux noirs de sa fille.

— Assez, Petite, assez, dit-il avec caresse ; — tu es lasse… repose-toi.

Madame de Laurens ferma le livre et baisa la main de Mosès.

— À ton tour, Lia, dit-elle en se levant.

La jeune fille quitta aussitôt sa broderie et vint s’asseoir sur les coussins, aux pieds du vieillard.

Abel, profitant de ce mouvement, prit la place abandonnée par sa jeune sœur, et mit ses bottes vernies sur les chenets.

Petite se rapprocha de la table de jeu, où le regard inquiet de l’agent de change la suivit.

Elle s’assit auprès du chevalier de Reinhold. Les yeux caves de Mira se fixèrent sur elle avec une expression étrange et n’en bougèrent plus.