Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/241

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lures de la boiserie, représentaient des scènes de l’Ancien-Testament. Les meubles affectaient des formes orientales, et les pieds foulaient doucement l’étoffe moelleuse d’un tapis constellé.

La pièce était éclairée par deux candélabres à branches, suivant la coutume juive. À l’extrémité la plus éloignée du foyer, il y avait une sorte d’encensoir d’or où quelques parfums brûlaient lentement et jetaient dans l’air leurs odeurs suaves et tièdes.

Auprès de la cheminée, M. de Geldberg était assis sur l’unique fauteuil qui se trouvât dans la chambre.

C’était un vieillard souffreteux et usé. De rares cheveux, blancs comme la neige, couronnaient son crâne luisant. Son visage était jaune et sillonné d’innombrables rides. Il se tenait courbé ; son menton touchait sa poitrine.

En somme, son aspect était vénérable. Une seule chose eût pu faire reconnaître en lui Mosès Geld, l’ancien usurier de la Judengasse.

Cette chose, c’était ses petits yeux gris, dont l’âge avait modéré les roulements inquiets, mais qui parfois lançaient encore à l’improviste de vifs regards, par-dessous la frange blanche de ses sourcils.

Il était immobile dans son grand fauteuil, rembourré douillettement, et il jetait des regards contents sur ses enfants, réunis autour du foyer.

Auprès de lui, assise sur des coussins, se tenait Sara, sa fille aînée, — madame de Laurens.

Nous qui ne l’avons vue qu’une seule fois, devant l’entrée du Temple, nous l’eussions à peine reconnue, tant la lumière des bougies la changeait à son avantage.

Sous ce jour nouveau, sa peau brune prenait un éclat extraordinaire. Le feu de ses yeux noirs éblouissait ; les nattes brillantes de ses cheveux, où couraient quelques rangs de corail, achevaient de nuancer sa beauté, et lui donnaient cette voluptueuse couleur dont la poésie revêt les prêtresses des plaisirs orientaux.

Elle était demi-couchée sur ses coussins, et son coude s’appuyait au bras du fauteuil de son père. Sa pose avait un abandon exquis et développait toutes les perfections de sa taille.

Comme elle était très-petite et que ses membres déliés s’arrondis-