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LE BOSSU.

— Souffrir qu’un pareil misérable vienne en face de moi, prince souverain, sans témoins ni preuves…

Lagardère fit un pas vers lui et dit :

— J’ai mes témoins, j’ai mes preuves !

— Où sont-ils vos témoins ?… s’écria Gonzague, dont le regard fit le tour de la salle.

— Ne cherchez pas ! répondit le condamné ; ils sont deux, mes témoins… le premier est ici : c’est vous !…

Gonzague essaya un rire de pitié, mais son effort ne produisit qu’une effrayante convulsion.

— Le second, poursuivit Lagardère dont l’œil fixe et froid enveloppait le prince comme un réseau, le second est dans la tombe.

— Ceux qui sont dans la tombe ne parlent pas ! dit Gonzague.

— Ils parlent quand Dieu le veut ! répliqua Lagardère.

Autour d’eux, un silence profond se faisait, un silence qui serrait le cœur et glaçait les veines.

Ce n’était pas le premier venu qui aurait pu faire taire dans toutes ces âmes le scepticisme moqueur. Neuf sur dix eussent provoqué le rire méprisant et incrédule dès le début de cette plaidoirie qui semblait chercher ses moyens par