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LE BOSSU.

Elle fit comme Aurore : elle baisa les mains liées du prisonnier…

— Et c’est vous ! murmura-t-elle, vous qui plaidez ma cause !

Elle reçut dans ses bras Aurore défaillante.

— Oh ! ne la brisez pas ! reprit-elle ; c’est moi !… c’est ma jalousie !… c’est mon orgueil !…

— Ma mère ! ma mère !… s’écria Aurore ; vous me déchirez le cœur !

Elles s’affaissèrent toutes deux sur le large siège. Lagardère restait debout devant elles.

— Votre mère se trompe, Aurore, dit-il ; vous vous trompez, madame… Votre orgueil et votre jalousie, c’était de l’amour… Vous êtes la veuve de Nevers ; qui donc l’a oublié un instant si ce n’est moi ?… Il y a un coupable… il n’y a qu’un coupable… c’est moi !…

Son noble visage exprimait une émotion douloureuse et grave.

— Écoutez ceci, Aurore, reprit-il ; mon crime ne fut que d’un instant et il avait pour excuse le rêve insensé, le rêve radieux et mile fois adoré qui me montrait ouvertes les portes du paradis… Mais mon crime fut grand… assez grand pour effacer mon dévouement de vingt années… Un instant, un seul instant, j’ai voulu arracher la fille à la mère…