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LE BOSSU.

contre vous… Vous avez ordonné, je vois cela, et votre mère obéissante est venue… Ne répondez pas, Aurore, interrompit-il ; le temps passe et je ne vous donnerai plus beaucoup de leçons… Aimez votre mère… obéissez à votre mère… Aujourd’hui, vous avez l’excuse du désespoir, mais demain…

— Demain, Henri, prononça résolument la jeune fille, si vous mourez, je serai morte !

Lagardère recula d’un pas, et sa physionomie prit une expression sévère :

— J’avais une consolation, dit-il, presque une joie… c’était de me dire en quittant ce monde : Je laisse derrière moi mon œuvre… et là-haut, la main de Nevers se tendra vers moi, car il aura vu sa fille et sa femme heureuses par moi…

— Heureuse ! répéta Aurore ; heureuse sans vous !…

Elle eut un rire plein d’égarement.

— Mais je me trompais, reprit Lagardère ; cette consolation, je ne l’ai pas… cette joie, vous me l’arrachez !… J’ai travaillé vingt ans pour voir mon œuvre brisée à la dernière heure… Cette entrevue a suffisamment duré… Adieu, mademoiselle de Nevers !

La princesse s’était approchée doucement.