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LE BOSSU

Et Aurore mettait sa tête dans son sein. C’était charmant et c’était navrant. Dona Cruz détourna les yeux.

— Mère, dit Aurore, j’ai des pensées tout autour de moi et je ne peux les saisir… Il me semble que c’est toi qui ne veux pas me laisser voir clair… Pourtant je sens bien qu’il y a en moi quelque chose qui n’est pas moi-même. Je devrais être autrement avec vous, ma mère…

— Tu es sur mon cœur, enfant, chère enfant, répondit la princesse dont la voix avait d’indicibles douceurs. Ne cherche rien au delà… repose-toi contre mon sein… sois heureuse du bonheur que tu me donnes…

— Madame… madame ! dit dona Cruz qui se pencha jusqu’à son oreille ; le réveil sera terrible !

La princesse fit un geste d’impatience. Elle voulait s’endormir dans cette étrange volupté qui pourtant lui torturait l’âme.

Avait-on besoin de lui dire que tout ceci n’était qu’un rêve ?

— Mère, reprit Aurore, si tu me parlais… je crois bien que le bandeau tomberait de mes yeux… Si tu savais… Je souffre…

— Tu souffres ? répéta madame de Gonzague en la pressant passionnément contre sa poitrine.