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LE BOSSU.

cœur revient sur votre visage… laissez-moi vous supplier de m’apprendre quelle voix calomnieuse a pu vous faire oublier en ce jour trente ans de loyale amitié…

— Monsieur le prince, interrompit le duc d’Orléans d’une voix qui voulait être sévère, mais qui trahissait le doute et l’émotion, je n’ai qu’à vous répéter mes propres paroles : justifiez-vous, et vous verrez si je suis votre ami !

— Mais de quoi m’accuse-t-on ? s’écria Gonzague feignant un emportement soudain ; est-ce d’un crime de vingt ans ?… est-ce un crime d’hier ?… Philippe d’Orléans a-t-il cru, une heure, une minute, une seconde, je veux le savoir, je le veux !… avez-vous cru, monseigneur, que cette épée… ?

— Si je l’avais cru !… murmura le duc qui fronça le sourcil tandis que le sang montait à sa joue.

Gonzague prit sa main de force et l’appuya contre son cœur.

— Merci, dit-il les larmes aux yeux ; entendez-vous, Philippe !… je suis réduit à vous dire merci ! parce que votre voix ne s’est point jointe aux autres pour m’accuser d’infamie…

Il se redressa comme s’il eût eu honte et pitié de son attendrissement.