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LE BOSSU.

zague, quel est le pouvoir de la calomnie.

Le régent se leva sur le coude et regarda en face le plus vieux de ses amis.

Un nuage passa sur son front sillonné de rides précoces.

— J’ai été calomnié, répliqua-t-il, dans mon honneur, dans ma probité, dans mes affections de famille… dans tout ce qui est cher à l’homme… mais je ne devine pas pourquoi tu me rappelles, toi, Philippe, une chose que mes amis tâchent de me faire oublier.

— Monseigneur, répondit Gonzague dont la tête se pencha sur sa poitrine, je vous prie de vouloir me pardonner… la souffrance est égoïste… je pensais à moi, non point à Votre Altesse Royale…

— Je te pardonne, Philippe, je te pardonne… à condition que tu me diras tes souffrances.

Gonzague secoua la tête et prononça si bas que le régent eut peine à l’entendre :

— Nous sommes habitués, vous et moi, monseigneur, à déverser le ridicule sur certains sentiments… je n’ai pas le droit de m’en plaindre : je suis complice… mais il est des sentiments…

— Bien, bien, Philippe ! interrompit le régent ; tu es amoureux de ta femme… c’est une belle et noble créature !… nous rions de cela