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LE BOSSU.

Le prince lui mit la main sur l’épaule.

— Après la première nuit, poursuivit le bossu, je lui donnai un jour pour réfléchir et s’habituer à ma tournure… Elle ne put pas.

— Et alors ?… fit Gonzague, qui le considérait attentivement.

Le bossu saisit un verre sur un guéridon et se prit à regarder le prince en face. Leurs yeux se choquèrent. Ceux du bossu exprimèrent tout à coup une cruauté si implacable, que le prince murmura :

— Si jeune… si belle… tu n’eus pas pitié ?

Le bossu, d’un mouvement convulsif, écrasa le verre sur un guéridon.

— Je veux qu’on m’aime ! dit-il avec un accent de véritable férocité ; tant pis pour celles qui ne peuvent pas !

Gonzague resta un instant silencieux. Le bossu avait repris sa mine froide et railleuse.

— Holà ! messieurs, s’écria tout à coup le prince qui poussa du pied Chaverny endormi, qu’on emporte cet homme !

La poitrine d’Ésope II se souleva. Il fit effort pour cacher son triomphe.

Navailles, Nocé, Choisy, tous les amis du petit marquis voulurent tenter un dernier effort en sa faveur. Ils le secouèrent ; ils l’appelèrent.