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LE BOSSU.

point attention, tant était profonde sa rêverie, au bruit léger que fit dona Cruz en entrant dans la chambre.

Celle-ci s’approcha sur la pointe des pieds et vint baiser ses cheveux par-derrière.

Aurore tourna la tête lentement ; le cœur de la gitanita se serra en voyant ces pauvres joues pâles et ces yeux éteints déjà par les pleurs.

— Je viens te chercher, dit-elle.

— Je suis prête, répondit Aurore.

Dona Cruz ne s’attendait point à cela.

— Tu as réfléchi, depuis tantôt ?

— J’ai prié… Quand on prie, les choses obscures deviennent claires…

Dona Cruz se rapprocha vivement.

— Dis-moi ce que tu as deviné ? fit-elle.

Il y avait là encore plus d’intérêt affectueux que de curiosité.

— Je suis prête, répéta Aurore ; prête à mourir.

— Mais il ne s’agit pas de mourir, pauvre petite sœur…

— Il y a longtemps, interrompit Aurore d’un ton de morne découragement, que j’ai eu cette idée pour la première fois… C’est moi qui suis son malheur, c’est moi qui suis le danger dont il est menacé sans cesse… C’est moi qui suis son mauvais ange… Sans moi, il