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LE BOSSU.

rière ses deux mains, disait d’une voix altérée :

— J’ai froid… j’ai froid jusqu’au fond de l’âme… l’idée qu’on veut me livrer à un pareil homme !…

— Va ! dit dona Cruz ! Il ne te mangerait pas !… je me chargerais bien, moi, de le rendre doux comme un agneau… Tu ne le trouves donc pas bien gentil ?

— Viens ! emmène-moi !… Je veux passer le reste de la nuit en prières…

Elle chancelait. Dona Cruz la soutint dans ses bras.

La gitanita était bien le meilleur petit cœur qui fût au monde, mais elle ne partageait point du tout les répulsions de sa compagne.

C’était bien là le Paris qu’elle avait rêvé.

— Viens donc, dit-elle, pendant que Chaverny, profitant d’une courte échappée de silence, demandait avec larmes qu’on lui permît d’expliquer sa position.

En descendant l’escalier, dona Cruz dit :

— Petite sœur, gagnons du temps… fais semblant d’obéir, crois moi… plutôt que de te laisser dans l’embarras je l’épouserais, moi, le Chaverny !

— Tu ferais cela pour moi !… s’écria Aurore dans un élan de naïve gratitude.