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LE BOSSU.

— À contre-cœur… c’est le mot, repartit le bossu.

— Pourquoi ?

— Parce que le bonheur entier de son existence est l’enjeu de cette partie, qu’il aurait pu ne pas jouer…

— Et qui l’a forcé à la jouer, cette partie ?

— Un serment.

— Fait à qui ?

— À un homme qui allait mourir.

— Et cet homme s’appelait ?

— Vous le savez bien, monseigneur… Cet homme s’appelait Philippe de Lorraine, duc de Nevers.

Le régent laissa tomber sa tête sur sa poitrine.

— Voilà vingt ans de cela !… murmura-t-il d’une voix véritablement altérée ; je n’ai rien oublié… rien !… Je l’aimais, mon pauvre Philippe… il m’aimait !… Depuis qu’on me l’a tué, je ne sais pas si j’ai touché la main d’un ami sincère !…

Le bossu le dévorait du regard. Une émotion puissante était sur ses traits. — Un instant, il ouvrit la bouche pour parler, mais il se contint par un violent effort. Son visage redevint impassible.