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LE BOSSU.

pour le mal, cela est d’un saint ou d’un ange ! Mal pour mal, bien pour bien, voilà l’équité humaine… Mais rendre le mal pour le bien, par le nom du Christ ! cela est odieux et infâme… Cette pensée-là ne peut venir que de l’enfer… Elle me trompait… Je comprends tout… On va essayer de m’accabler sous le nombre… On va nous séparer…

— Nous séparer ! répéta Aurore, bondissant sur place à ce mot comme un jeune lévrier ; qui ?… cette femme !

L’expression de ses traits était en ce moment si étrange, que la jeune fille recula épouvantée.

— Au nom du ciel ! s’écria-t-elle, qu’y a-t-il ?

Elle revint vers Henri qui avait mis sa tête entre ses mains, et elle voulut lui jeter les bras autour du cou.

Il la repoussa avec une sorte d’effroi.

— Laissez-moi ! laissez-moi ! dit-il ; cela est horrible !… Il y a une malédiction autour de nous, une malédiction sur nous.

Les larmes vinrent aux yeux d’Aurore.

— Vous ne m’aimez plus, Henri, balbutia-t-elle.

Il la regarda encore. Il avait l’air d’un fou.

Il se tordit les bras et un éclat de rire douloureux souleva sa poitrine.