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LE BOSSU.

quoi, cette visite a été l’une des pages les plus émouvantes de ma vie. Je n’ai couru là aucun danger ; à proprement parler, rien ne m’y est advenu, — et pourtant, dussé-je vivre cent ans, je me souviendrais des impressions que ce lieu a fait naître en moi.

» Henri voulait s’entretenir avec un vieux prêtre nommé dom Bernard et qui avait été chapelain de Caylus, sous le dernier seigneur de ce nom.

» Une fois passé la frontière, nous laissâmes Françoise et Jean-Marie dans un petit village au bord de la Clarabida. Nos quatre espadins étaient restés de l’autre côté des Pyrénées. Nous nous dirigeâmes seuls, Henri et moi, à cheval, vers la bizarre éminence qu’on appelle dans le pays le Hachaz, et qui sert de base à la noire forteresse.

» C’était par une matinée de février, froide, triste, mais sans brume. Les sommets neigeux que nous avions traversés la veille détachaient à l’horizon sur le ciel sombre l’éclatante dentelle de leurs crêtes à l’Orient, un soleil pâle brillait et blanchissait encore les pics couverts de frimas.

» Le vent venait de l’ouest et amenait lentement les grands nuages, suspendus comme un terne rideau derrière la chaîne des Pyrénées.