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LA VAMPIRE

René de Kervoz avait été introduit le soir même où commence notre récit.

La trousse de Charlevoy ayant fait encore son office, Jean-Pierre entra dans ce salon où René avait attendu, rêvant et rafraîchissant son front brûlant au froid des carreaux, la venue de sa mystérieuse maîtresse.

En face de la fenêtre, de l’autre côté de la rue Saint-Louis-en-l’Ile, était la borne où Angèle s’était assise pour endurer le cruel supplice dont elle devait mourir.

C’était de là qu’elle avait reconnu ou deviné la silhouette de son fiancé aux derniers rayons de la lune.

C’était de là qu’elle avait vu, quand la lampe allumée à intérieur porta deux ombres sur le rideau, ces deux têtes approchées en un baiser qui lui poignarda le cœur.

C’était là qu’elle avait désespéré de la bonté de Dieu.

Il n’y avait plus de rideaux à la croisée, plus de tentures aux portes, plus de tapis, plus de meubles, plus rien.

Le déménagement était fait.

La décrépitude de la vieille maison se montrait partout.

Seulement, çà et là, un bouquet fané, un chiffon de femme, un livre restaient comme des témoins de la vie passagère qui avait animé cette solitude.

Dans la seconde chambre, celle que nous vîmes ornée selon la mode orientale, et que Lila choisit pour raconter au jeune Breton son histoire fabuleuse ou véridique, les hautes piles de coussins et les lampes de Bohême avaient disparu comme tout le reste.

Cette deuxième pièce était, en apparence, la fin de la maison. La muraille opposée à la porte ne présentait aucune solution de continuité.

C’était pourtant bien cette muraille qui s’était ouverte quarante-huit heures auparavant pour montrer à René ébloui le réduit charmant, au fond duquel l’alcôve drapait ses rideaux de soie ;

Le boudoir où la collation était servie ;

La chambre sans fenêtres, en un mot, le lit d’amour qui devait se changer en prison.

Ce serait insulter à l’intelligence du lecteur que de lui expliquer pourquoi une pièce construite et installée précisément pour servir de cachette, au temps où l’art de ménager des cachettes était à son apogée, ne montrait à l’extérieur aucune trace de son existence.

Jean-Pierre Sévérin et son escouade restèrent près d’une heure au premier étage, furetant et fouillant. Toutes leurs recherches furent inutiles.

Il n’y avait plus à visiter que le deuxième étage, qui fut