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LA TACHE ROUGE

montagne qui marche, tant elle était chargée de vêtements superposés.

— On aurait beau vous donner le portrait de la petite, dit-elle en pressant son pas éléphantin ; à ces heures-ci, pas moyen de rien voir sans chandelle. Nous allons prendre une goutte de consolation, et ce ne sera pas dommage pour moi, car j’ai de la glace plein le cœur.

Il y eut chez la femmelette un mouvement d’hésitation assez marqué.

— Est-ce que ça vous fait honte d’entrer au débit ? demanda la Bastien d’un ton de reproche.

— Non, répondit maman Marquis, pas avec vous.

La paysanne se mit à rire et répéta en contrefaisant de son mieux la douce voix de sa compagne :

— « Pas avec vous ! » je vous dis que ça ressemble comme deux gouttes d’eau à quelqu’un de comme il faut ; mais ce n’est pas des gouttes d’eau que je prends, moi, quand j’ai passé la nuit à la dure ; soyez tranquille, ma bonne dame Marquis, on n’est pas assez bête pour vous forcer à rien boire.

Le débit était un petit trou qui s’ouvrait à une vingtaine de pas de la cloche, et dans lequel on descendait par un perron intérieur de trois marches.

Maman Marquis entra derrière la Bastien et passa son mouchoir blanc sous ses narines, offensées par l’odeur trop énergique du lieu.