Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rement respectables, donneraient leur petit doigt pour avoir un rôle.

Un rôle pour les filles d’Ève, c’est le bonheur.

Ysole était heureuse, émue, ivre d’espoir et d’orgueil.

Son rôle consistait à occuper cette voiture qui l’attendait au coin de la rue Harlay-du-Palais, et à attendre son père, dirigé de ce côté par les instructions de ses mystérieux sauveurs.

C’était là, du moins, ce qu’on avait dit à Ysole. Nous verrons tout à l’heure si on lui avait dit la vérité.

Le général devait monter dans la voiture, dont le cocher avait ordre de prendre aussitôt le galop, au cas où l’ombre d’un danger se présenterait. Dans le cas contraire, le général devait s’introduire dans la maison du quai des Orfèvres, embrasser la plus jeune de ses filles, cette chère petite malade qu’il avait si grand peur de perdre, et revêtir un déguisement complet. L’absence concertée de tous les gens de service assurait le secret.

Si le lecteur trouve quelque chose de défectueux dans ce plan, nous confesserons qu’il n’avait pas le sens commun ; mais nous ajouterons que cela importait peu : le plan était uniquement destiné à tromper, pour quelques instants, notre belle Ysole. Un stratagème plus naïf encore l’eût pareillement satisfaite. Elle était subjuguée, et c’était elle-même qui serrait le bandeau sur ses yeux.

Et si le lecteur, devant cet aveu, juge notre Ysole par trop crédule, nous le renverrons aux histoires authentiques d’imposture et d’amour. N’essayez jamais d’assigner une