Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prêt à combattre des géants sur un signe de votre blanche main… Mais quand notre prisonnier va être libre, j’espère bien avoir acquis à ma cause un des meilleurs officiers-généraux de l’armée française.

— Si le comte de Champmas n’était pas corps et âme à Votre Altesse royale, s’écria Ysole enthousiaste, je le renierais pour mon père !

— Vous êtes une loyale sujette et je vous remercie, répliqua le prince toujours gaiement. Parlons affaires. Vous avez éloigné vos gens ?

— La maison est complètement vide.

— Je viens de voir une voiture stationnant au coin de la rue du Harlay, je suppose que c’est la vôtre ?

— C’est la mienne.

— Nous n’en aurons pas pour longtemps et vous reviendrez ce soir veiller votre intéressante petite poitrinaire, quand le général sera en sûreté. C’est vous qui devez le sauver : je vous ai réservé cette joie.

— Oh ! prince ! s’écria Ysole, comment payer jamais ?…

— Un peu de votre amour, et je serai trop généreusement récompensé !

Il ferma vivement la bouche d’Ysole, qui allait répliquer.

— Regardez, dit-il.

Ils étaient sur la terrasse. La nuit était tout à fait tombée. Le prince montra du doigt le balcon du deuxième étage, où une lueur s’alluma pour s’éteindre aussitôt.

— On a enlevé le foulard rouge, prononça-t-il tout bas, votre père est libre !

Les genoux d’Ysole fléchirent.

— Mon roi ! balbutia-t-elle, mon Dieu ! je suis à vous corps et âme !

Il la regarda galamment et dit :