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Ils affirmaient avec conviction qu’ils étaient devenus « honnêtes gens. »

Néanmoins, ils avouaient avoir levé mensuellement un tribut sur le véritable entrepreneur du crime, M. Nicolas, dit le prince, ou le duc de Bourbon.

C’était une scène étrange, car, pendant qu’ils parlaient, M. Badoît et Pistolet recueillaient avec soin les débris humains entassés dans le trou et les plaçaient dans la boîte oblongue.

Quand cette tâche fut terminée, Paul Labre prit lui-même la boîte et sortit sans prononcer une parole, M. Badoît le suivit.

Pistolet, avant de les imiter, dit :

— J’ai déjà fait pincer une fois le marchef, c’est assez, n’ayant jamais appartenu au gouvernement. J’ai fréquenté Mme Landerneau, honorablement, elle est belle femme. M. le baron n’irait peut-être pas jusqu’à se gêner de vous cueillir, si on avait besoin de votre témoignage en justice. C’est de vendre vos frusques et d’aller vers d’autres rivages, voir si le printemps s’avance. Je vas souper à trente francs par tête dans un cabinet particulier avec le bancroche et des dames de la première noblesse. J’ai besoin de ça pour me remettre, n’étant plus habitué à vos odeurs du peuple. Bonsoir. Si vous me rencontrez dans la rue, prière de ne pas me saluer.

Les trois assassins restèrent seuls et comme abasourdis.

Le marchef se remit le premier ; il redressa sa taille d’athlète, racornie par la terreur, et s’écria :

— Sont-ils bêtes !