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Lecoq sourit.

Le colonel murmura avec une tendre émotion :

— Moi, j’ai toujours soutenu que notre Nicolas avait du talent, beaucoup de talent. L’union fait la force ; aimez-vous comme des frères… Et en besogne, mes chéris. Après la séance, je déjeunerai avec bien du plaisir.

Les deux groupes se rencontrèrent au centre du rond-point. Le général de Champmas salua le colonel Bozzo avec une respectueuse courtoisie. Le colonel lui dit :

— Un bien joli temps, ce matin, général. Je ne voulais pas croire que ce fût vous.

— J’éprouve le même étonnement à vous voir ici, répondit M. de Champmas.

— Messieurs, déclara Lecoq avec importance, je vous prie de ne point motiver votre surprise réciproque. Sur le terrain, chacun doit s’abstenir de toute parole pouvant blesser l’un ou l’autre des deux adversaires.

Il vous avait, en vérité, l’air d’un raffiné d’honneur.

— Attendez-vous quelqu’un, Monsieur le baron ? ajouta-t-il. La présence d’un seul témoin ne me paraît pas régulière.

— Un seul témoin suffit pour faire une déclaration, repartit M. de Champmas.

— Ah ! ah ! fit Lecoq, il ne s’agit que d’une déclaration ? Alors, s’il vous plaît, pourquoi cet objet ?

Il désigna d’un geste moqueur la boîte de combat que le général tenait à la main.

— Pour vous, si vous êtes un honnête homme, monsieur, répliqua gravement M. de Champmas. Je suis habitué à estimer, à vénérer le colonel Bozzo, que j’ai rencontré autrefois dans des circonstances qui l’hono-