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Pistolet murmura :

— Parler n’est pas bavarder et le temps approche où vous en occuperez un plus haut, de grade, s’il y a une justice dans le gouvernement.

Le brigadier se tint plus droit sur son cheval.

— On vous observe de filer en douceur, dit-il gravement ; nous n’avons ni le même âge, ni la même tenue, ni la même position dans la société.

Le gamin se dit :

— Ça serait drôle de passer la jambe au gendarme. Heureusement, je suis dans la cavalerie.

Soulagé par cette réflexion, il reprit avec humilité.

— Vous êtes grand et je suis petit, ça, c’est vrai, brigadier ; mais n’empêche que j’ai fait partie comme vous de l’armée française. À la suite d’importants voyages autour du monde, entrepris pour me ranger en perfectionnant mon éducation et la langue maternelle, j’ai servi zéphir à Alger, tel que vous me voyez.

Le brigadier resta un instant silencieux, puis il laissa tomber ces méprisantes paroles :

— Le gendarme est le choix du militaire, les compagnies de discipline en sont l’écume. Je vous réitère de filer au large et de plus en plus péremptoirement.

La patience n’était pas le fort de Pistolet. Il interrogeait déjà sa téméraire imagination pour savoir comment on pourrait bien se passer des gendarmes et de l’autorité de La Ferté-Macé qui, évidemment, étaient mal disposés, lorsqu’il eut l’idée de jeter ce der-