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Elle avait voulu dire à Paul : « J’ai vu mon père. »

Elle l’avait voulu malgré la défense expresse du général.

Suavita serait morte pour son père ; pour Paul elle eût donné bien plus que sa vie.

C’était un grand et profond amour, une de ces passions instinctives qui semblent marquées par le sort. Pour celles qui aiment ainsi, rien n’existe en dehors de l’homme aimé.

Elles vivent par lui, elles meurent en lui.

Le général avait pénétré dans la maison de Paul Labre non point en corrompant les domestiques, mais en se servant de l’effroi causé par le meurtre de Thérèse Soulas. Les « gens de Paris » avaient pris la peine de propager la nouvelle de ce meurtre dans tous les environs, et, bien entendu, ils avaient dirigé les soupçons vers le baron d’Arcis, qui devait payer la loi.

Le général, profitant du trouble excité par cette accusation, rapidement propagée, avait pesé de tout le poids de son nom et de son âge sur le valet normand et la servante.

Là-bas, on n’a pas confiance : telle est la règle. Défiance et Normandie riment sans en avoir l’air. Les imputations les plus absurdes, dirigées contre le plus saint des hommes, ne passent jamais, dans ces campagnes