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J’étais orgueilleuse, je devins ambitieuse. Ma perte fut de vouloir m’élever en dehors de cette famille où j’étais entrée par la charité d’une sainte… J’ignore pourquoi je vous dis ces choses qui ne vous regardent point. Il semble que j’aie besoin d’expliquer aux autres comme à moi-même les motifs de ma chute et d’expliquer aussi pourquoi le froid pardon de mon père ne m’a pas arrêtée sur la pente de ma profonde perdition.

— Mais vous n’êtes pas perdue ! s’écria Paul, plus respectueux en face de cette confession volontaire qui lui semblait partir d’un grand cœur. Ysole… Mademoiselle… Votre repentir vous relève…

— Je ne me repens pas, interrompit-elle d’une voix sèche et brève qui sonna comme si elle fût tombée d’une bouche de marbre. J’aime et je respecte mon père ; le séjour de sa maison me fait horreur. J’y entrai par l’aumône de l’épouse légitime, j’y reste par le pardon qui vient de la pitié. Je hais le pardon et l’aumône.

Elle prononça ces derniers mots avec une sourde énergie. Ses yeux brûlaient à travers la frange recourbée de ses cils.

Elle était miraculeusement belle.

Paul devenait ivre à la regarder.

— Je suis venue, reprit-elle, parce que j’ai appris aujourd’hui des choses qui vous concernent et que j’ignorais lors de notre première entrevue. Dans ma pensée, je ne devais plus vous revoir…

— Quoi !… balbutia Paul.