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transformation.

Tout renaissait chez Suavita, la vie, l’intelligence, la force, tout, excepté le pouvoir de parler.

Et encore il y avait un symptôme étrange.

Depuis le jour où Paul l’avait couchée pour la première fois sur le pauvre lit de sa mansarde, dans la rue de Jérusalem, Paul ne se souvenait point d’avoir jamais vu la fillette faire effort pour parler.

Et maintenant ces efforts se renouvelaient, se rapprochaient. Dans l’impatience, dans la douleur qu’elle avait de n’être point comprise, Suavita montrait sa bouche avec désespoir.

Il semblait qu’un lien allait se briser, une parole s’élancer…

Le domestique normand ouvrit la porte et dit :

— Il y a une dame qui attend dehors. Elle est venue à cheval.

Ce fut comme un souffle de tempête qui balaya la tendre émotion de Paul.

Suavita l’entoura de ses bras, et ses grands yeux si éloquents supplièrent :

— Ne va pas ! Oh ! ne va pas, je t’en prie !

Il se dégagea doucement et sortit en disant :

— Attends-moi, je vais revenir.

Son cœur bondissait dans sa poitrine et le nom d’Ysole montait jusqu’à ses lèvres.