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pour cela, il reliait ces hommes au meurtre de Thérèse et à ce fait qu’il était lui-même accusé.

Mais sa raison se révolta bientôt contre ces capricieuses hypothèses.

C’était d’aujourd’hui seulement que ces hommes pouvaient le regarder comme un ennemi. Et, quant à Thérèse Soulas, quel ombrage cette pauvre femme pouvait-elle leur porter ? Pour tuer, il faut haïr ou craindre.

— J’aimais Thérèse, dit-il enfin ; je faisais mieux que l’aimer : j’avais pour elle de la reconnaissance. Ma mère est morte dans ses bras, et elle fut bien bonne pour vous, ma fille, au temps où je ne pouvais vous soigner.

Suavita répondit avec son regard profond et triste :

— J’ai prié pour elle et je l’ai pleurée.

— Mais, est-ce vrai ? s’écria Paul, qui vous a dit cela ? qui avez-vous vu ?

Il sentit son bras serré, comme toujours, quand la fillette voulait marquer une de ses questions.

Il ne manquait guère de prendre garde à ce geste, qui était un de leurs plus sûrs moyens de s’entre-comprendre ; mais, cette fois, une pensée subite l’emporta : il songea tout d’un coup aux gens qui disaient derrière lui dans le village :

— Il a encore le fusil !…

Il songea à l’air que son domestique normand avait en lui demandant s’il n’était