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quins ?

Ces jolis garçons-là ne devraient jamais bouger : autant de pas, autant de sottises !

La première idée de Pistolet fut de se rendre chez M. le baron pour prendre langue et surtout pour lui intimer l’ordre de rester tranquille. Cela lui semblait très simple : il avait une conscience si nette de sa supériorité.

Mais cette justice même qu’il se rendait lui donna à réfléchir. Parler à Paul Labre, c’était déjà compter avec lui. Paul Labre allait peut-être lui faire des objections ou bien lui donner des ordres.

— Le monde renversé, quoi ! s’écria-t-il sans savoir qu’il parlait.

L’éclopé lui répondit la bouche pleine :

— Quand j’aurai l’argent de ma m’man, je vous paierai à boire pour que vous m’entriez dans les auberges. Moi, je ne suis point assez hardi.

— Tais-toi, bancroche ! et avale, ordonna Pistolet.

Non ! il ne fallait pas aller chez Paul Labre. Rien qu’à se montrer ainsi, on compromet sa toute-puissance.

Voyez si, dans les drames, l’homme qui sauve ne se tient pas toujours dans son nuage.

Il fallait sauver Paul Labre en dehors de lui et malgré lui.

— Pas vrai, bancroche ? fit le gamin, content de son idée. Si tu veux retirer un quelqu’un de l’eau, tu commences par l’étourdir un petit peu, sans le blesser dangereusement, pour pas qu’il te gêne.