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châtain foncé. Son profil aquilin rappelait vaguement les portraits et médailles des princes de la maison de Bourbon.

Il parlait avec lenteur et affectait dans sa pose une sorte de majesté. Il semblait se défendre contre une accusation.

Voici ce qu’il disait au moment où Pistolet put prêter l’oreille à ses paroles :

— Dans l’affaire du général de Champmas, j’agissais pour l’association et avec l’agrément de l’association ; dans l’affaire présente, et grâce à moi, l’association va doubler d’un seul coup son capital. Mes mesures sont prises : je suis prêt à les soumettre au conseil.

— Va promener dans les parterres, Fanchette, ma mignonne chérie, dit tendrement le vieillard.

Il attira vers ses lèvres desséchées le front charmant de la comtesse Corona, qui s’éloigna d’un pas nonchalant et gracieux.

Quand elle fut partie, un des assistants, que Pistolet reconnut pour être le fameux M. Lecoq de La Perrière, prit la parole et dit sèchement :

— Mon beau Nicolas, on t’avait mis entre les mains un joli coup de commerce. Papa et moi, nous venons de parcourir les titres de propriété ; c’est superbe. Mais tu n’es pas de force, mon bonhomme. Ton passé te bat dans les jambes. On a vu M. Badoît hier à Alençon, ce matin à La Ferté-Macé. M. Badoît ne peut pas être seul. En outre, Mlle de Champmas et Paul Labre se rencontreront bien quelque jour, hé ! bonhomme ?

On doit penser si Pistolet était tout oreilles.

Le beau Nicolas répondit avec un majestueux dédain :

— Vous oubliez deux pierres d’achoppement sur ma route, mon maître : le général et la femme Thérèse Soulas. Si vous êtes habile, je ne suis pas manchot. J’espère que