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réfléchir.

— Vois-tu, dit-il en s’arrêtant à deux ou trois portées de fusil du mur, je cherche la manière de m’en servir ; ça n’ira peut-être pas tout seul.

— C’est soif que j’ai, répondit l’innocent, retombé au fond de son apathie.

Pistolet tressaillit et lui planta sa main sur la bouche en murmurant :

— Fais le mort !

Comme le gars étonné essayait une résistance machinale, Pistolet, usant de son grand moyen, lui « passa la jambe » et l’étendit à terre sans bruit aucun.

— Fais le mort ! répéta-t-il avec un accent de véritable menace, ou tu ne seras jamais riche ! Je ne suis pas ici pour toi, ma vieille ; si tu me gênes, tant pis pour ta peau !

L’innocent n’avait garde de se révolter.

Il resta étendu dans l’herbe et ne bougea plus.

Pistolet s’éloigna de quelques pas et prêta l’oreille.

Un bruit venait des massifs voisins.

— C’est tout de même taquinant de ne pas bien connaître les localités, pensa le gamin qui hésitait. On ne voit pas le château d’ici et je ne sais pas à qui j’ai affaire.

Il se retourna vers l’éclopé qui le regardait avec ses gros yeux étonnés, et son doigt levé lui ordonna impérieusement le silence.

Puis il se coucha tout de son long, disant :

— On va tâcher de savoir !

Et il se prit à ramper dans l’herbe, clairsemée sous les arbres, avec une telle adresse, que les Indiens de Cooper lui auraient certainement fait compliment, s’ils l’avaient vu.

À mesure qu’il avançait, le bruit des voix devenait plus distinct.

Il y avait là évidemment plusieurs personnes qui s’entretenaient. Le sens de leur conversation échappait encore à notre gamin.