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— J’ai vu le gaillard qui tient ainsi l’affût en plein midi, murmura Paul. Il n’est pas du pays et n’a pas bonne mine.

Ysole avait le pied à l’étrier ; elle écoutait encore d’un air indécis et inquiet.

— Ne serait-ce point sur nous qu’on a tiré ? pensa-t-elle tout haut.

Et avant que Paul Labre pût répondre, elle ajouta :

— Monsieur le baron, le fait seul d’avoir été vu avec moi vous créerait de mortels ennemis.

— Mademoiselle, répliqua Paul, non point à cause de moi, mais à cause de vous, nous devons nous séparer ici. Vous m’avez confié votre vengeance et aussi le soin de votre sûreté, car il ressort de vos paroles qu’une menace pèse sur vous. J’espère que votre confiance ira jusqu’à me laisser le choix des moyens à prendre pour vous faire libre et vengée.

— Soyez prudent, dit Mlle de Champmas, qui mit son doigt sur sa bouche souriante, songez que vous ne vous appartenez plus !

— Je songe que je ne saurais payer à trop haut prix les seuls instants de vraie joie que j’aie eus en ma vie. Vous m’en avez assez dit pour qu’il soit superflu de m’indiquer ma route. Il s’agit de l’homme qui dirige « la conspiration ? »

— Il s’agit du maître du Château-Neuf, en effet. Vous êtes seul, et il est entouré d’une année.

— Retournez chez votre père, Ysole. J’ai hâte de vous dire mon secret comme vous m’avez donné le vôtre. Demain, à cette même heure, revenez au lieu où nous sommes, je vous y apporterai votre vengeance et votre liberté.

— Que comptez-vous faire ? demanda Mlle de Champmas, qui se mit en selle. Dites-le-