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de lèvres, impatientes, l’eussent déjà nommé : « l’amoureux transi, » Paul Labre ne connaissait pas encore la voix de celle qu’il aimait.

Il y avait dans son passé ce qu’il fallait pour faire de sa timidité native une maladie cruelle et incurable.

La voix d’Ysole, grave et douce, lui pénétra le cœur comme un chant ; mais son étonnement dépassait de beaucoup son émotion.

L’aventure commençait pour lui comme un rêve délicieux, mais extravagant.

Il avait peur de s’éveiller et peur aussi de trop croire.

Quand il eut attaché le cheval d’une main maladroite et qu’il se retourna, il vit Ysole assise au bord de la fontaine.

Elle lui fit signe d’approcher, il obéit.

— Asseyez-vous près de moi, lui dit-elle.

Il s’assit. Elle reprit :

— Je crois que vous m’aimez, Monsieur Paul Labre.

Elle avait les yeux sur lui.

Il releva les siens et, sous son noble regard, les paupières d’Ysole se baissèrent.

— Depuis que mon cœur bat, répondit-il à voix basse, je n’ai jamais aimé que vous, Mademoiselle.

Elle voulut sourire.

Paul lui toucha le bras.

— Ne vous moquez pas ! prononça-t-il d’un accent où il y avait à la fois une supplication et un ordre. Il y a bien longtemps, j’ai voulu mourir pour vous.

— Bien longtemps ! répéta Mlle de Champmas.

Puis, retirant son bras avec une tardive