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que le besoin d’agir. Ils ont la plus poétique moitié de la vaillance : le mépris absolu de la mort ; mais ils s’endorment parfois sur le chemin qui mène à la bataille.

L’idée fixe de Paul, la vraie, c’était son amour pour Ysole de Champmas : amour de tête et de poète, passion fougueuse et froide à la fois ; adoration romanesque qui vivait surtout d’obstacles.

C’était toujours ce rêve de l’adolescent, contemplant, par la croisée de sa mansarde, le bonheur impossible.

Paul Labre n’avait pas vieilli.

Chose singulière, il aimait tant son rêve qu’il éprouvait une sorte de frayeur à l’idée d’échanger quelques paroles avec Ysole.

Il l’adorait telle qu’il la voyait de loin, telle qu’il l’avait faite, pourrait-on dire.

Et depuis quelque temps, depuis très peu de temps, il éprouvait un remords à l’adorer ainsi.

L’enfant qui restait à la maison, la pauvre petite Blondette, grandissait à son insu dans son affection.

Il lui reconnaissait des droits ; il plaidait pour elle contre lui-même.

Comme tous les fous, car cette belle Ysole était pour lui une folie, il avait ses heures lucides.

À ses heures lucides, Paul était à la fois un esprit subtil et un cœur d’or.

Bienfait oblige. Il s’était engagé beaucoup envers cette enfant dont il était désormais toute la famille. Loin de se dissimuler les obligations contractées, il se les exagérait avec l’ardente générosité de sa nature.

Sa paresse n’était que pour l’action, ou