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Et sa conscience, jusqu’alors, était restée droite, si profondes qu’eussent été les misères de sa vie.

Au moment où Ysole prononça ces mots qui devaient influer si gravement sur la conduite de sa mère, Thérèse Soulas, à bout de combats et de sophismes, se rendait à l’évidence, au sujet de Blondette, que Paul Labre gardait toujours chez lui.

Après avoir fait tout au monde pour égarer les suppositions de Paul et l’éloigner de la vérité qu’elle fuyait elle-même, elle était sur le point d’avouer son erreur, non point à Paul, mais à Ysole.

Il lui semblait qu’Ysole, en se faisant la messagère de cette grande joie, en disant au général : Suavita est retrouvée ! allait racheter tout d’un coup la tendresse de son père. Quant à la question de savoir comment Ysole accueillerait la nouvelle de l’existence de sa sœur, Thérèse n’avait aucun doute. Elle la voyait d’avance s’élancer vers le logis de Paul Labre et rapporter Suavita dans ses bras.

Mais Ysole avait dit : « Mon père me chasserait, j’en suis sûre. »

Pour la seconde fois, à son insu, comme la première, elle venait de prononcer l’arrêt de la pauvre Suavita.

Thérèse, placée entre sa conscience et sa fille, allait devenir coupable, et, cette fois, de parti pris.

Elle ne voulait pas que sa fille fût chassée.

Elle se rendit chez Paul Labre, occupé déjà de la grande guerre qu’il déclarait aux assassins de son frère, et reprit avec vivacité un thème que, naguère encore, elle soute-