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C’était trop. Il y a des sacrifices qui doivent être absolus.

Nous savons qu’au retour elle avait trouvé déserte la maison du général. Ysole était enlevée, et nul n’avait su dire le sort probable de Suavita.

Mme Soulas croyait partager l’ignorance commune, ou plutôt elle s’efforçait de le croire, car, dès la première minute, ses pressentiments avaient donné un nom à la fillette inconnue sauvée par Paul Labre.

En vain avait-elle voulu se tromper elle-même ; en vain avait-elle cherché et trouvé abondamment la preuve de ce fait que Suavita de Champmas possédait toute sa raison et n’était point muette.

Cette enfant privée de raison et muette était Suavita de Champmas.

Il y avait un crime.

L’intervention seule de Paul Labre avait empêché un meurtre.

La pensée d’Ysole était venue comme une angoisse navrante à l’esprit de Thérèse Soulas. Elle vivait dans un monde qui discute le crime pertinemment et qui le connaît à fond, tel qu’il est.

Ysole, ou mieux, l’homme qui avait perdu Ysole, avait un intérêt manifeste à faire disparaître Suavita.

Toutes ces choses se classèrent dans les réflexions de Thérèse, pendant l’absence que fit Paul Labre pour acquérir la preuve de la mort de Jean, son frère.

Thérèse fut quatre jours toute seule avec Suavita dans la mansarde de Paul Labre.

Il y avait en elle pour l’enfant une sorte d’adoration.