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que la parole elle-même fût restée au-dessous de leur subtil reproche :

— Ah ! Paul, on ne vous attend même pas !

Il y avait là-dedans toute la plainte passionnée d’un grand amour méconnu, toute la protestation d’un noble et doux orgueil, toute la douleur d’une immense défaite.

Blondette était une femme à cette heure.

En conscience, Paul ne pouvait traduire à la fois tout cela.

Il pensa, et c’était déjà beaucoup :

— Comme elle m’aimerait !

Puis il répéta tout haut, pour garder une contenance :

— Jalouse ! petite jalouse !

Les yeux de la fillette s’éteignirent, et elle baissa la tête comme pour dire :

— C’est vrai, je suis jalouse ; cela me fait souffrir. Il ne faut pas m’en vouloir.

Ce fut elle-même qui mit la main sur le verrou formant la fermeture de la porte.

Paul voulut l’arrêter, elle ouvrit malgré lui. Son joli doigt tendu lui montra la campagne, tandis qu’elle se rangeait elle-même prudemment à l’abri du mur, comme si elle eût voulu lui dire à la fois :

— Vous ne voulez pas qu’on me voie, je me cache.

Et, en outre :

— Allez, je ne vous retiens plus. Je vous promets d’être bien sage et de ne pas trop pleurer.

Paul hésita, mais il sortit en disant :

— Tu vas pousser le verrou, chérie.