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La chose certaine, c’est que M. le baron d’Arcis gardait chez lui une jeune femme ou une jeune fille qui ne sortait jamais et que nul n’avait jamais vue, pas même à la paroisse, le dimanche.

Notez bien cela comme un fait inouï, d’autant plus inouï que le baron d’Arcis avait son banc à l’église et qu’il ne manquait jamais d’y venir entendre la grand’messe.

Le général comte de Champmas faisait de même.

Le baron d’Arcis et lui se connaissaient à tout le moins un peu, car la première fois qu’ils s’étaient rencontré à l’église, le baron avait adressé au général un respectueux salut que celui-ci avait rendu avec une bienveillance marquée, mais empreinte, comme toutes ses actions, d’une froideur profondément triste.

Le général était, en effet, d’une tristesse mortelle.

Il portait le grand deuil, qu’il n’avait point quitté, disait-on, depuis la mort de sa fille cadette, survenue trois ans auparavant.

D’ordinaire, la perte d’un enfant resserre les liens entre le père et les enfants qui survivent. Il n’en était pas ainsi chez le général. Sa froideur découragée s’étendait jusqu’à la belle Ysole, qui était désormais sa fille unique.

Lors de cette première rencontre, le général, en sortant de l’église, avait tendu la main au baron d’Arcis. Quelques paroles brèves avaient été échangées entre eux.