Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/335

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le roi mangeait bien, buvait mieux et dirigeait de très haut la conspiration, dont les membres indigènes n’étaient point admis à contempler sa personne sacrée tous les jours.

Il avait sans cesse avec lui quelqu’un des gens de Paris qui semblaient non seulement le servir avec beaucoup de respect, mais encore le surveiller d’assez près.

La Goret, outre les frais de construction et d’aménagement du château, avait déjà fourni de très grosses sommes pour le bien de la conspiration. On l’avait prise par ses faibles : l’ignorance et l’égoïsme.

La Goret donnait de l’argent pour être reine de France.

Inutile d’insister : le mot est dit dans sa sincère énormité.

Ceux qui ne connaissent pas les paysans hausseront les épaules ; ceux qui connaissent les paysans seront à peine étonnés.

Singulier peuple, près de qui l’éloquence même perd sa peine quand elle n’a qu’une vérité grande, claire, profitable à enseigner, mais à qui vous ferez croire, si vous faites l’imposture bien absurde et bien grossière dans son expression, n’importe quelle bourde monstrueuse.

L’imposture, ici, avait été savamment calculée ; on l’avait entourée d’une mise en scène enfantine. La Goret était dans le piège jusqu’au cou.

Elle demeurait toujours à la ferme, mais on lui avait donné « une maison » parce que, en attendant mieux, elle avait déjà rang de « duchesse à tabouret. »

Ces mots, qu’ils ne comprennent pas, ont