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merce.

» Il m’est venu à l’idée, depuis, que M. Lecoq et M. V… étaient peut-être le même homme.

» Je n’aurai pas le temps de vérifier ce soupçon.

» M. V… me dit son nom, ce soir-là, et j’eus froid jusque dans la moelle de mes os. Tout ignorant que j’étais, j’avais dix-neuf ans, et les petits enfants, à Paris, savent quel est le métier de M. V…

» Il me fit appeler à dix heures du soir.

» Il avait un habit de bal, une cravate blanche et plusieurs crachats d’ordres étrangers. Cette splendide toilette avait été faite à mon intention. La question de savoir comment je le jugerais au lendemain de cette mascarade lui importait peu ; il voulait m’éblouir, ce soir, et il m’éblouit.

» J’ai été agent de police, mon frère, et c’est pour cela que je me tue. Je t’ai promis de te raconter l’acte unique, accompli par moi dans ces fonctions douloureuses et taxées d’infamie. J’hésite.

» La mort de notre mère m’a déchargé du devoir de vivre.

» La vue d’Ysole m’a enseigné la honte et le désespoir. J’ai compris qu’il fallait mourir, seulement lorsque le souffle d’amour a éveillé mon cœur.

» Je me suis demandé : Puis-je être aimé ? Ma raison a répondu : Non, c’est impossible.

» Mon parti a été pris.

» Ysole ne saura jamais que le rêve d’un malheureux tel que moi a outragé sa noble et souriante jeunesse.

» J’hésite. J’ai peur que tu ne me comprennes point. Au premier aspect, le plan de