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ivre plus d’une fois dans les bas chemins qui entouraient sa loge.

La Goret aussi était de temps en temps « gaie de boire », ou, du moins, elle en avait la mine.

Leur loge, perdue au fond d’un trou, présentait l’image de la plus parfaite détresse.

Et pourtant, dès cette époque, ils auraient pu acheter la moitié du canton et la payer comptant, haut la main.

Ils étaient laids à voir tous les deux, pour ne pas dire repoussants ; la femme, qui se trouvait être de beaucoup la plus forte, battait l’homme cruellement.

Ils avaient l’air alors de deux horribles amoureux.

Ceux qui les avaient écoutés, par hasard, derrière les haies, riaient bien en racontant qu’ils parlaient argent, les deux mendiants sordides, et or aussi, par cent mille francs… par millions !

Leur fils, ils avaient un fils, qui était le plus vilain gars à dix lieues à la ronde, avait été exempté de la conscription pour cause de mutilation. Un commencement de procédure avait établi que le père et la mère l’avaient estropié de parti-pris avec un merlin à fendre le bois, pour éluder la loi.

L’instruction s’était arrêtée par pitié : Ils étaient si misérables !

Pour ces sortes de crimes, les paysans ne sont pas sévères entre eux. On n’en regardait les Goret ni mieux ni plus mal.

Le mari mourut vers 1831, faute d’une potion de quelques sous que le médecin des