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cendre l’escalier, il dit :

— Si vous connaissiez les positions sociales que j’ai occupées, vous sauriez qu’on peut chercher l’oubli de ses malheurs !

En bas de l’escalier, c’était ce cellier, dont le soupirail jetait une lueur terne au-dehors.

Il y faisait presque nuit, malgré une lampe fumeuse qui était censée l’éclairer.

Au comptoir, le vieillard à lunettes garnies et à visière verte s’asseyait.

Il faut avoir vu ces choses pour les dire.

Quand on les a vues, il faut les peindre telles qu’elles sont, sans ménagement ni exagération.

Le vieillard était là seul de son sexe. Elles ont des mœurs.

En voyage, elles prennent le wagon réservé aux dames.

On se tromperait si on les confondait avec ces luronnes qui boivent et fument à Asnières, en compagnie des joyeux canotiers. Elles ne fument pas ; elles détestent l’orgie qui chante et rit ; elles craignent les hommes ; elles se respectent.

Elles forment, à n’en pas douter, une classe à part, une classe d’aliénées : la plus sinistre de toutes.

Elles se divisent en deux catégories : celles qui boivent ensemble ou deux à deux, et celles qui boivent seules.

Les premières sont les moins nombreuses, les moins curieuses aussi, puisqu’elles vivent en buvant et peuvent se ranger parmi les esclaves d’un vice connu.

Celles qui boivent seules sont les vraies « Anglaises », les « tanches solitaires », les pratiques de fond de la licherie : les mortes.

Celles-là ont un type singulièrement accusé : elles se ressemblent toutes, portant l’ivresse avec gravité, et tombant, comme les