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sous. Le bourgeois s’assit, mais si rudement que son séant rendit un son de coussins qu’on fouette.

Le restant de la galerie s’éparpilla en riant de tout son cœur.

Le chiffonnier avait déjà disparu.

— En a-t-on assez ? demanda le gamin. Ou souhaite-t-on la suite au prochain numéro ?

Mais il s’interrompit pour dire avec une expression de sincère regret :

— Tiens ! c’est M. Badoît que j’ai rissolé ! pas possible !

Et il tendit ses deux mains avec empressement pour relever son ancien patron.

M. Badoît, remis sur ses pieds, frotta sans rancune la place meurtrie et dit :

— Tous ces temps-ci, j’aurais donné gros pour te rencontrer, Pistolet, ma vieille. Je n’ai jamais retrouvé d’insecte pareil à toi, malgré tes défauts et ton tempérament dissolu. Tu n’as pas changé du tout depuis trois ans, sais-tu ?

— Trois ans et quatre mois, patron, repartit Pistolet, qui contemplait son ancien chef avec un sincère plaisir. C’était fin avril, 35, que je fis la fugue en question pour un bon motif de me ranger et d’acquérir une position dans le monde par mon assiduité et mon travail de n’importe quel genre. Vous, je vous trouve encore embelli et gras comme une loche… Ah ! dame, ça me fait quelque chose de vous revoir, par exemple ! Payez à déjeuner, voulez-vous ? J’accepterai sans rancune.

— Et à dîner aussi, Clampin, ma vieille. J’ai besoin de toi.