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— Ces affaires-là sont dangereuses ; je me mets en contravention, mais vous m’allez, quoi ! Ne vous montrez pas avant d’avoir doublé la Hève.

— Encore ! s’écria-t-il en répondant à un matelot qui lui annonçait la visite d’un étranger. C’est donc une procession, aujourd’hui, à la fin !

— C’est le frère de M. Labre, dit le matelot.

Pour le coup, la bonne figure de Legoff se dérida en grand.

— Cara ! s’écria-t-il, le frère de M. Jean Labre ! La perle des passagers ! Ce doit être un joyeux camarade ou que le diable m’emporte !

Paul venait à lui lentement ; il était si pâle et si défait qu’on eût dit un malade sortant de son lit.

— Beau gars ! grommela Legoff en le regardant s’approcher, mais pour joyeux, fichtre non !

Il tendit la main à Paul qui resta un instant muet devant lui. Sans savoir pourquoi encore, Legoff partagea bientôt cette émotion, et ce fut d’un ton tout troublé qu’il demanda :

— Eh bien ! Monsieur Labre ! le frère a dû être bien heureux de vous embrasser. Avons-nous assez parlé et reparlé de vous, depuis le Rio-de-la-Plata ! J’espère que M. Jean a fait un bon voyage de Paris ?

Pour répondre, Paul fit un grand effort. Il ne put prononcer que ces mots :

— Il est donc bien vraiment parti pour Paris !

Si Legoff ne l’avait point soutenu, il serait