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sûr !

Elle approcha sa main de celle de l’enfant ; sa main tremblait violemment.

— Je veux tenter l’épreuve ! fit-elle. Mais, auparavant, je veux l’embrasser.

Ses lèvres, blêmies par une indicible frayeur, effleurèrent le front de la fillette endormie.

Il y avait dans ce baiser une tendresse passionnée, mais pleine d’angoisse.

L’enfant eut un tressaillement faible.

Mme Soulas lui donna une seconde caresse qui l’éveilla doucement.

En voyant ses paupières s’entr’ouvrir, Mme Soulas chancela ; mais elle dit tout bas, penchée qu’elle était sur l’oreiller :

— Suavita !

L’enfant lui jeta un regard farouche, et sembla chercher dans la chambre un protecteur absent.

— Suavita, ma chérie, reprit Thérèse, j’ai une lettre de votre bon père qui vous dit d’avoir confiance en moi et de m’aimer. La voici, lisez.

Les traits de la fillette se contractèrent, et sa bouche rendit ce son rauque que nous avons décrit.

En même temps, ses yeux se refermèrent.

Mme Soulas tomba sur ses deux genoux et joignit ses mains avec ferveur.

— Non, non, mon Dieu, dit-elle, celle-là n’est pas Mlle de Champmas, et je peux chercher ceux qui l’aiment !… ceux qui la pleurent sans doute… sans trouver sur ma route le crime de ma propre fille !