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d’une mère inquiète.

Il y avait dans sa pensée autre chose que le présent. Elle songeait laborieusement.

Paul Labre glissa sur l’incident relatif à la lettre de son frère qu’il avait trouvée et lue vers six heures du matin.

Il la mentionna pourtant et promit d’y revenir.

— Je lui ai donc donné ce nom de Blondette, poursuivit-il, en attendant que je sache son vrai nom, car je le saurai, fallût-il retourner Paris comme un gant ! Et n’est-ce pas que ça lui va bien, Blondette ? Vers sept heures, sept heures et demie, elle s’est éveillée, mais là, tout à fait. Son premier regard a encore été bien effrayé ; mais tout de suite après, elle m’a souri.

Je ne sais pas comment vous dire cela, maman, vous le verrez bientôt vous-même, son sourire fait mal. Il y a dedans quelque chose de vague et de troublé. On croirait qu’elle cherche sa raison perdue, et j’ai peur…

Paul n’acheva point, mais son doigt toucha son front.

Thérèse le regardait fixement.

Au lieu de répondre, elle pensait :

— Je n’ai jamais ouï-dire que la petite Mlle de Champmas fût une innocente ou une folle. Le général m’aurait parlé de cela. Et ne lui a-t-il pas adressé la lettre, ma lettre, comme à sa sœur ? On n’écrit pas, quand il y a une folle : « Ysole, Suavita, mes filles chéries. »

Ce nom de Suavita, prononcé en elle-même, la fit tressaillir.

Son regard semblait demander à l’enfant : Es-tu Suavita ?

Mais sa pensée poursuivait :